Les enténébrés

Les enténébrés, Sarah Chiche (Points, 2020)

Les enténébrés est un roman dense, à la structure complexe et au propos douloureux. C’est un livre qui se mérite, pour lequel j’ai dû m’accrocher. Il faut lui consacrer du temps, se laisser imprégner de son ambiance, parfois (souvent) pesante. Une lecture qui n’a pas été facile en temps de confinement, mais que j’ai, en fin de compte, beaucoup appréciée.

Sarah aime Paul. Ils vivent ensemble, à Paris, et ont une petite fille adorable. Et puis Sarah rencontre Richard à Vienne, elle en tombe follement amoureuse. Commence alors une double vie qui la conduit doucement mais sûrement à perdre pied.

Sarah est l’héritière d’une histoire familiale douloureuse, une histoire qui a laissé des traces contre lesquelles elle se bat. Une arrière-grand-mère internée, un grand-père déporté, une grand-mère abîmée et abandonnée. Une mère, enfin, qui a grandi comme elle a pu, a jonglé avec les amants, n’a jamais su être une maman et a causé de nombreux dommages. Ce que raconte Sarah, lorsqu’elle enquête sur sa famille, c’est la douleur de la maladie mentale. La bipolarité en héritage, voilà. C’est dur, c’est douloureux, c’est beau, c’est profond. 

Ensuite, la mère de ma mère est morte. Ma mère a été soignée. Puis j’ai été soignée. Plus tard, j’ai compris que ce que ma mère m’avait fait, et ce que son père lui avait fait, on le lui avait fait dans les camps. Et, pour persister dans l’existence, je me suis trouvé des raisons de les excuser, alors qu’il n’y a rien à excuser. Un jour, tout cela n’a plus eu la moindre importance.

Le texte est parfois structuré, parfois brouillon, comme peut l’être le cheminement d’une pensée.

On retrouve cette même complexité dans le rapport de Sarah aux hommes, à l’amour. Violent, douloureux, cru, parfois tendre. Parfois seulement. 

À lire ces pages on n’est pas surpris que Sarah exerce en tant que psychologue et psychanalyste. On se dit que c’était une évidence, que c’est grâce à cela qu’elle va s’en sortir. Qu’elle doit s’en sortir. Pour briser la chaîne, pour sauver sa fille.  

Les enténébrés est un roman sur la façon dont notre histoire nous construit sur des générations, un roman sur les relations mère-fille, sur la relation aux hommes, sur l’introspection nécessaire et l’analyse salvatrice (ou vice versa). Un roman profondément humain, souvent impudique, dont l’écho va m’accompagner un certain temps, j’en suis sûre.  

Sixième roman lu dans le cadre du prix du Meilleur Roman des lecteurs Points 2020.

Les enténébrés, de Sarah Chiche, est disponible en Points (janvier 2020, 408 pages).

Les enténébrés a reçu le prix de la Closerie des lilas en 2019.

2 réflexions au sujet de « Les enténébrés »

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